L’ancien ministre de l’Education du gouvernement de Belaïd Abdesslam, actuellement enseignant universitaire et consultant dans l’Hexagone, Ahmed Djebbar, a rompu le silence qu’il a secrètement gardé depuis près de deux décennies en révélant qu’il avait fait délivrer de faux diplômes universitaires à de hauts responsables algériens dont il s’est abstenu de citer les noms. La confidence de l’ancien ministre connu pour sa droiture, sa probité morale et intellectuelle faite au détour d’une conférence qu’il avait donnée en Algérie et reprise par notre confrère Le Soir d’Algérie dans sa page «Périscope» a été reléguée au registre des faits divers.
La déclaration n’a suscité aucun commentaire, indignation ou dénonciation. En voulant libérer sa conscience ou pour d’autres considérations qui lui sont propres, Ahmed Djebbar ignorait-il à ce point la gravité de son geste au double plan de l’éthique universitaire et pénal ?
Dans un pays qui se respecte, l’aveu de M. Djebbar ne resterait pas sans suite. La justice se serait immédiatement autosaisie du dossier pour débusquer les diplômés faussaires.
Des plaintes avec constitution de parties civiles auraient fusé de partout : de la communauté universitaire, du ministère de l’Enseignement supérieur pour faire la lumière sur ces allégations qui auraient provoqué, ailleurs, un véritable tsunami juridico-médiatico-politique.
Le statut social, politique, l’appartenance à des réseaux d’influence interfèrent-ils sur l’action de la justice ?
Nul doute que si cette affaire de trafic de diplômes était le fait de simples citoyens aux épaules frêles, leur sort aurait été vite scellé par la justice. Mais dans le cas de figure qui nous intéresse, parce qu’il s’agit de gros poissons, le pavé de Ahmed Djebbar ne semble pas près de connaître de suite.
Affaire classée ? L’ancien ministre de l’Enseignement supérieur que l’on disait proche du regretté président Boudiaf n’a pas de quoi être fier de s’être fourvoyé dans cette condamnable affaire de trafic de faux diplômes pour le compte de hauts dignitaires de l’Etat. La meilleure manière de se repentir de son geste qui ne l’absout pas pour autant de la responsabilité pénale, c’est d’avoir le courage politique de livrer à l’opinion et à la justice les noms des faux «doctours» qui nous gouvernent et dont il a eu à gérer les dossiers.
Ce dossier de faux diplômes impliquant des personnalités haut placées intervient après bien d’autres scandales touchant d’autres secteurs tels que les affaires des faux moudjahidine, des faux magistrats… qui ont paradoxalement valu aux personnes qui ont sorti ces dossiers des démêlés sans fin avec la justice. Tout laisse penser que la sortie de M. Djebbar s’apparente à une autre bouteille à la mer qui n’arrivera jamais à bon port.
Omar Berbiche