Un collectif estudiantin a déclenché, depuis samedi, une action de protestation s’étalant sur plusieurs jours, pour dénoncer une réaffectation des chambres de deux cités universitaires de Boumerdès qui étaient jusque-là mixtes.
Le dernier carré de la mixité, au sens noble du terme, dans les cités universitaires de la wilaya de Boumerdès sera «éradiqué» dès cette rentrée.
Ce qui motive les étudiants à engager un bras de fer avec la Direction des œuvres universitaires de Boumerdès, auteur de cette initiative.
Dans ce dossier, la résistance de ce groupe d’étudiants et d’étudiantes des cités de l’ex-INH et de l’ex-INIL contre la décision de la Direction des œuvres universitaires (DOU) de Boumerdès est émouvante.
Certificats médicaux descriptifs délivrés par l’hôpital de Thénia en main, (nous détenons les deux copies) deux étudiants de ce collectif font état d’agressions physiques de la part des vigiles du campus sud (ex- INIL) de l’université de Boumerdès.
D’ailleurs, lors de notre passage au foyer estudiantin de l’INH, où une action de protestation s’organisait, les deux victimes n’ont pas manqué de nous montrer les séquelles des agressions. De l’intérieur, j’allais ouvrir le portail pour aider mes camarades à entrer lorsque les agents de sécurité se sont rués sur moi», dira Zoheir qui cite le prénom d’un de ces agents, lequel, précise- t-il, est réputé pour sa violence et a fait l’objet de plusieurs rapports. La victime ajoutera : «Un agent barbu m’a dit d’un air très menaçant : si j’avais une klash, je tirerais sur vous !» Le second étudiant victime des vigiles abonde dans le même sens sur le climat de violence.
Cela s’est passé samedi. Les deux étudiants ont porté plainte. «Première nouvelle ! Je ne suis pas au courant de ces agressions», dira plus tard M. Bouyahiaoui, directeur de la DOU de Boumerdès, en réponse à notre question sur ces agressions.
Au foyer, où s’organisait, lundi, la protestation, Cheikha et Fatiha, étudiantes en deuxième année à la faculté des hydrocarbures et originaires de Djelfa, signaient la pétition. «Nous refusons de quitter la résidence de l’INH pour aller résider à l’INIL», protestent-elles. Les opposants au transfert des filles vers l’ex-INIL et des garçons vers l’ex-INH a commencé en juin. «Ayant eu vent de ce programme de changement de résidence, nous avions réuni 585 signatures pour rejeter la réservation exclusive de la résidence INIL aux filles. Paradoxalement, la majorité des signataires sont justement des filles.
Mais l’administration de la DOU n’en a pas tenu compte», dit un membre de l’association de ladite résidence, qui assure, par ailleurs, que les organisations estudiantines, à l’exception de l’UGEL, connue pour son allégeance au parti islamiste MSP, soutiennent cette protestation. Il y a lieu de rappeler que les résidents dans les deux cités mixtes sur les 5 non mixtes sont séparés par l’affectation par sexe des pavillons.
Pour les frondeurs, les problèmes qui se posent dans les cités universitaires sont liés à la bonne gestion des moyens affectés par l’Etat aux étudiants. Pour rappel, les opposants à cette décision, qu’ils considèrent comme une interdiction de la mixité dans les cités universitaires de Boumerdès, ont envahi le rectorat et d’autres services pour fustiger cette action qu’ils voient comme une démarche ayant un soubassement à caractère idéologique. «Je comprend l’inquiétude de ces étudiants, mais cette réorganisation de l’hébergement nous a été dictée par des impératifs de gestion et aussi dans le but de sécuriser les jeunes filles. Par ailleurs, faut-il le préciser, l’étudiant a le droit de réclamer la qualité de l’hébergement mais nullement celui de choisir son lieu de résidence», dira la directrice Chaffika Kesri lors du point de presse qu’elle a animé ce mardi pour faire le bilan des préparatifs de la rentrée universitaire. La patronne de l’université clame son refus d’aborder cette affaire sous l’angle politique et rappelle que la mixité existe dans les autres structures universitaires, notamment les amphis, les restaurants, les bibliothèques, et ne sera pas, selon elle, de sitôt interdite.
Lors de ce même point de presse, M. Bouyahiaoui a assuré qu’il assume entièrement cette décision qui fait partie d’un programme entamé en 2005 et qu’elle a été prise dans le cadre de la bonne gestion des moyens d’hébergement et de la sécurité des filles. «Les étudiants et les étudiantes ne peuvent pas s’ingérer dans mes prérogatives, comme ils ne peuvent pas choisir le lieu de résidence», affirmera-t-il. Les deux responsables ne cessaient de clamer leur bonne fois. Ceux qui les connaissent n’ont aucune raison de douter de leur sincérité, mais les convoitises politico-idéologiques non dissimulées des islamistes sur l’université algérienne, la réalité sur le terrain et la politique générale du gouvernement algérien mettent à mal cette bonne foi.
Par le soir